Spiritualité

Réjouis-toi, Marie ! Vraiment ?

horning angel statuette

L’Avent est une période de réjouissances. Mais est-ce que la naissance de Jésus était un moment uniquement joyeux pour Marie et Joseph ? On creuse la question ensemble.

J’ai souvent entendu que si telle ou telle chose était la volonté du Seigneur, les portes s’ouvriraient. Si cela peut être vrai dans une certaine mesure, je trouve cette formule (trop) simpliste.

Marie, savais-tu ?

En cette période de l’Avent, nous célébrons la venue du Christ sur terre, et son incarnation au sein du ventre de Marie, très jeune femme du Moyen-Orient, il y a à peu près deux mille ans. C’est évidemment une commémoration réjouissante, mais derrière cet évènement on ne peut plus beau se cachent des circonstances bien difficiles. 

Dans son évangile, Luc nous fait entrer dans les coulisses (Luc 1 : 26-33) :

Le sixième mois, Dieu envoya l’ange Gabriel dans une ville de Galilée, Nazareth, chez une jeune fille dont le fiancé s’appelait Joseph. Celui-ci était un descendant du roi David ; le nom de la jeune fille était Marie. L’ange entra chez elle et lui dit : « Réjouis-toi ! Le Seigneur t’a accordé une grande faveur, il est avec toi. » Marie fut très troublée par ces mots ; elle se demandait ce que signifiait cette salutation. L’ange lui dit alors : « N’aie pas peur, Marie, car tu as la faveur de Dieu. Bientôt tu seras enceinte, et tu mettras au monde un fils que tu appelleras du nom de Jésus. Il sera grand et on l’appellera le Fils du Dieu très-haut. Le Seigneur Dieu fera de lui un roi, comme le fut David son ancêtre, et il régnera pour toujours sur le peuple d’Israël, son règne n’aura pas de fin. » 

Marie, face à la loi juive et aux traditions de l’époque, risquait son couple, sa réputation, voire sa vie en tombant enceinte avant le mariage. Elle allait subir des moqueries et des jugements. L’appel divin sur la vie de cette jeune fille n’empêche pas les difficultés.

Ce n’est pas parce que c’est le bon chemin pour elle que ça va être un chemin facile. 

Prends courage !

D’après le texte cité plus haut, Marie était troublée. On peut imaginer les doutes, les peurs et les questionnements qui lui viennent à l’esprit. La paix divine n’est pas toujours immédiate, et les combats intérieurs ne sont pas irrémédiablement gage d’échec. Si elle a su s’en remettre à la volonté de Dieu, elle a probablement dû aussi traverser tout un nuancier d’émotions. 

Et pourtant, l’incarnation du Christ est pleinement et parfaitement la volonté de Dieu. Mais cette volonté pleine et parfaite n’a pas empêché que toutes les personnes concernées souffrent et soient confrontés à des défis et à de l’incompréhension. Évidemment, il y a aussi eu une part importante de joie et de reconnaissance, mais ce n’est pas parce que c’était le plan parfait de Dieu qu’il a été vécu parfaitement, c’est-à-dire sans aucun souci. 

Nous pouvons également penser à Joseph, qui a dû être convaincu par la venue de l’ange de soutenir et d’accompagner Marie dans cette grande aventure qu’est l’incarnation du Christ dans leur famille. 

Nous pouvons même parler du Christ. Lui qui était l’incarnation parfaite, le seul humain à réussir à vivre selon les standards du Père, et qui a fait face à des épreuves, des détracteurs et de l’opposition.  

En cette période de l’Avent, là où nous célébrons cette venue avec deux mille ans de recul, je nous invite à penser aux doutes, aux peurs mais surtout au courage de Marie et de Joseph. Si pour nous cette famille est une évidence, nous pouvons être reconnaissants du pas de foi qu’a été d’accepter cet appel impressionnant sur leur destinée par ce jeune couple de fiancés. 

Choisir une voie, choisir une voix

L’Histoire fige la réalité, et la perspective du temps souligne fréquemment les choix pris comme étant une normalité. Dans le tissage de nos vies, cependant, nous constatons souvent que toute belle chose comporte une prise de risque. Les décisions d’aujourd’hui seront notre quotidien de demain. Alors, si vous avez peur d’une prochaine étape, d’un appel un peu trop impressionnant ou de trop d’adversité face à vos choix, j’aimerais vous réconforter avec le vécu de Marie. Cette jeune femme qui s’attendait à une vie simple et qui a été surprise par l’incarnation divine. Cette fiancée qui a été chamboulée, dérangée dans son quotidien pour ne pas vivre une vie plus facile que ce qu’elle attendait, mais une vie tellement plus profonde.

Beaucoup de personnes appelées à un ministère particulier pourraient vous témoigner un vécu similaire. Personnellement, je n’aurais jamais pensé être pasteure. Je n’aurais jamais imaginé non plus m’identifier en tant que chrétienne. Dans les deux cas, il y a eu des moments de doutes et de peurs, mais je suis reconnaissante d’avoir suivi ce chemin, et tout ce qu’il y a à y vivre et à y parcourir. 

Scott Erickson, dans son livre Honest Advent1, parle de la vulnérabilité et d’un certain malaise qui viennent inéluctablement avec la rencontre concrète de Dieu. Comme si, par le souffle divin, nous devions casser une carapace qui devient petit à petit trop étroite. Comme si la croissance obligeait à faire face à la difficulté. Il n’est donc pas utile de voir les obstacles comme des interdictions. Si les difficultés étaient une preuve de la non-volonté de Dieu, le Christ ne serait même pas né !

Nous pouvons faire nôtres les promesses faites à Marie par l’ange, dans le sens où nous aussi sommes invités à être dérangés dans notre quotidien, pour participer à quelque chose de plus grand que nous-mêmes.

Nous pouvons nous réjouir, même dans les choix qui contiennent leur lot de difficultés, et, bien entendu, de joies ! 

« Réjouis-toi ! », voici la première phrase de la part de l’ange à Marie. Il lui explique qu’une grande faveur lui a été accordée , mais à quel prix ? Elle va être moquée (elle risquait même la peine capitale) et, lors de la vie adulte de son fils, elle va devoir être témoin des injustices qu’il va subir – jusqu’à la mort. Faire la volonté de Dieu n’est pas toujours facile, mais cela en vaut toujours la peine. 

Je terminerai avec une citation de Marion Muller-Colard :

« Mais la grâce n’est pas la paix. Et la paix, d’ailleurs, n’est pas non plus la tranquillité. La grâce est l’une de ces astuces de Dieu qui fait dire oui sans qu’on sache à quoi l’on acquiesce. Comme dans un mariage, sans doute. À ceci près : le oui que Marie s’apprêtait à dire à Joseph pouvait lui donner l’impression de maîtriser quelque chose de son destin. Le oui qu’elle dit à l’ange ce jour-là est pure folie. C’est le oui au Grand Dépourvu. »2

Références

1. Scott Erkison, Honest Advent, Zondervan Books, 2020

2. Marion Muller-Colard, L’intranquillité, Kindle, emplacement 311

À propos Lula Derœux

Lula Derœux est pasteure dans une église de la FEEBF en région parisienne. Elle est également en train d'étudier pour son master de théologie pratique à la FLTE. Elle est mariée avec Benjamin, lui aussi pasteur.

4 comments on “Réjouis-toi, Marie ! Vraiment ?

  1. Jean-Marc BELLEFLEUR

    Merci à Mme Deroeux, qui propose une lecture « non noëlisée » des textes décrivant la situation de Marie, et cependant pleine d’optimisme pour nos vies.

    • Il va de soi que Joseph ne dit un seul mot dans tout le récit biblique et pourtant il a des rêves qui montrent comment le silence est louange du vécu (Psaume 65).

  2. Psaume 65,2…Le silence pour toi est louange(Psaume),Marie et Joseph en font la preuve.

  3. Ping : Marie dans l’art ou dans les Évangiles : quelle différence ? – Servir Ensemble

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