Cet article s’inscrit dans le thème du mois de novembre, consacré à la sensibilisation face aux violences sexistes et sexuelles.
C’est dans le cadre de son DU sur les violences faites aux femmes que Murielle Selon a exploré la question douloureuse de la violence conjugale dans les églises évangéliques. D’autres études existaient déjà dans les églises d’Amérique du Nord ou dans la société française plus large, mais c’est la première fois que la recherche se penche sur les églises évangéliques en France.
Je me permets un spoiler majeur :
Oui, la violence conjugale existe dans les églises évangéliques. Elle y est même plus courante que dans la société française en général.
36 % des femmes évangéliques françaises interrogées sont ou ont été victimes de violences conjugales,1 alors que la moyenne nationale est d’une femme sur 10.2 Certes, l’autrice identifie quelques limites méthodologiques, mais ces chiffres sont cohérents avec ceux des études menées à l’étranger. Les églises évangéliques semblent donc bien être un terrain favorable aux violences conjugales.
L’autrice déroule son argument de façon méthodique :
Partie I La violence conjugale : la comprendre pour agir
I. Les connaissances théoriques indispensables pour identifier les violences conjugales
A. Les différents types de violences
B. Les différences entre conflit et violence conjugale – le cycle de la violence conjugale.
C. La stratégie de l’agresseur
II. Les églises protestantes évangéliques : un terreau propice aux violences conjugales
A. Leur histoire et leur fonctionnement
B. Les facteurs aggravants des E.P.E.
Partie II La prise en charge et la prévention des violences conjugales
I. La prise en charge des violences conjugales
A. Les violences conjugales : les identifier
B. La protection des femmes victimes de violences conjugales
C. L’accompagnement des femmes victimes de violences conjugales.
D. La prise en charge des femmes victimes de violences conjugales au sein des E.P.E.
II. La prévention des violences conjugales
A. Sensibiliser et former aux violences conjugales
B. Sensibiliser et former aux violences conjugales dans les E.P.E.
Elle commence par classer les violences conjugales en plusieurs catégories : verbales et psychologiques, physiques, matérielles, sexuelles, économiques, administratives, cyber-harcèlement, et spirituelles. Une attention toute particulière est portée aux violences psychologiques (intimidations, humiliations, dévalorisation, chantage affectif, interdictions de fréquentations amicales et/ou familiales, menaces de mort…)
Ces violences psychologiques, que Murielle Selon différencie clairement des conflits, peuvent exister sans violences physiques mais en sont toujours le terrain.
Elles contribuent à l’emprise du tyran domestique sur sa compagne, et ont des effets aussi délétères que les violences physiques.3
Si des mesures de protection légales existent pour les femmes victimes de violences physiques ou en danger immédiat de mort, l’autrice n’en identifie pas pour les victimes de violences psychologiques. Il s’agit alors pour l’église et les pasteur·es de savoir accompagner les victimes, reconnaître leur situation, les entourer, les aider à trouver de l’aide. Très peu de responsables d’Église y sont formés.
L’autrice conclut avec un appel à la formation dans les églises. Certes, une formation spécifique sur les violences conjugales pour les responsables d’église est nécessaire, mais un travail de fond sur les représentations l’est aussi. Les églises sont appelées à remettre en question la domination des hommes et la soumission des femmes, et à œuvrer activement pour l’égalité des sexes dans l’église.
Ce livre est issu d’un mémoire de DU, et le ton est celui d’un exercice académique. Je le recommande cependant à toutes et tous les responsables d’église et aux membres engagés : si les violences conjugales existent dans les églises évangéliques, elles font probablement aussi des victimes dans votre église. Murielle Selon tire la sonnette d’alarme et appelle les églises à regarder sincèrement leur fonctionnement et leurs zones d’ombre.
Références
1 Murielle Selon, La violence conjugale dans les églises évangéliques en France, p. 41
2 Selon, La violence conjugale, p. 37
3 Selon, La violence conjugale, p. 43-46
Merci pour cette recension Salomé. A titre d’exemple, le dépliant de présentation de l’Eglise de La Bonne Nouvelle de Mulhouse précise, dans son petit paragraphe de présentation : « [notre Eglise] pratique l’égalité des hommes et des femmes. » Cela donne le ton.
Bonjour et merci pour cette étude.
Il me semble que dans les églises la violence est plus psychologique
que physique et due surtout à l’enseignement de la soumission de la femme,
mais beaucoup refusent de voir qu’il s’agit de SOUMISSION RÉCIPROQUE !
Le Christ a apporté un commandement nouveau et révolutionnaire :
« Soumettez-vous les uns aux autres » Eph.5.21
Il ne s’agit pas de soumission unilatérale de la femme !
et il dépasse même le principe d’égalité des autres féminismes :
» Considérez les autres comme supérieurs à vous mêmes » Phil.2.3
PERSONNE N’EST ALLÉ AUSSI LOIN dans le respect de l’autre, homme ou femme
sans nier les différences !
Malheureusement la violence physique existe aussi . La personne qui la subit a honte et n’ose pas en parler. Elle peut culpabiliser et craindre un bouleversement dans sa vie familiale et ecclésiale.
Vous avez tout à fait raison, Magguy.
Bonjour,
vous avez raison, l’enquête de Murielle SELON ci-dessus, stupéfiante
révèle que la violence physique est bien présente dans les églises…..
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