Spiritualité

Elle espérait le jardinier, elle reçut le ressuscité 

green branches with olives and leaves against sunshine

Dans le livre de Jean, au chapitre 20, nous trouvons un récit qui n’est pas présent dans les autres évangiles : un moment particulier vécu par Marie de Magdala, fort en émotions (vous trouverez le texte biblique en bas de l’article). 

Face à sa peine, Marie cherche à retrouver le corps de la personne qui lui était chère. On pourrait imaginer qu’elle espère que la présence de sa dépouille la réconfortera, au moins un peu, et que de traiter son corps avec respect et amour redonnera un peu de dignité à son défunt Rabbouni. Mais voilà, le corps n’est plus dans le tombeau. Elle rencontre deux anges qu’elle ne reconnaît pas. Tourmentée par son chagrin, elle répond l’évidence. La question des êtres célestes « pourquoi pleures-tu ?» sous-entendait sûrement qu’elle n’avait plus de raison de sangloter, mais Marie était trop profondément dans sa peine pour se préoccuper de ces deux êtres. La même question lui est posée par Jésus lui-même, avec un ajout : « qui cherches-tu ?».

On pourrait ici aussi voir une question à sous-entendus. Cherches-tu la dépouille ou cherches-tu le Ressuscité ? Là encore, elle est tellement ancrée dans ses émotions qu’elle ne pense même pas à le nommer et répond comme si tout le monde savait de qui elle parlait. Marie rétorque par le désir de son cœur : retrouver le corps du Christ. En répondant, elle est tellement embrumée par la tristesse qu’elle ne reconnaît pas son maître ! Pendant un instant fulgurant, elle espère avoir trouvé une personne qui la rapprochera de la dépouille de Jésus : le jardinier. Elle comprendra, quand ce dernier l’appellera par son nom, que c’est le Christ lui-même, tout à fait ressuscité, qui lui offre sa présence. 

Rencontrer le jardinier

Cette apparition du jardinier dans le texte m’a toujours intriguée, et je vous propose aujourd’hui une analogie spirituelle et émotionnelle face à ce personnage.

Le jardinier, c’est celui qui entretient le jardin. Jusque-là, c’est évident. Cela devait être un magnifique jardin puisque :

  1. Il y a une personne dédiée à son entretien
  2. Nous savons que Joseph d’Arimathie était riche, car le tombeau offert pour y placer la dépouille du Messie était neuf, sûrement beau, définitivement cher.  

Cela devait donc être un endroit ravissant, pour y être enseveli. Le jardinier, c’est celui qui entretient ce bel endroit et qui incarne ce lieu, beau et verdoyant, mais qui a en son cœur un défunt, la mort. 

Revenons à l’interaction entre le Christ et sa disciple. Le moment charnière, c’est quand Jésus rappelle à Marie son identité. Peut-être avait-il une manière unique de dire son nom, peut-être que le son de sa voix était reconnaissable entre mille, peut-être a-t-elle simplement pris le temps de regarder réellement qui s’adressait à elle. Mystère… Tout ce que nous savons, c’est que c’est après l’avoir entendu prononcer son nom qu’elle reconnaît le Rabounni. 

Marie est instantanément appelée à tellement plus que de chercher la consolation auprès d’une dépouille dans un bel endroit. Elle ne va plus rester dans ce charmant jardin à pleurer son ami, elle et les disciples seront amenés à partir, loin de ce lieu physiquement florissant mais à présent stérile spirituellement, pour voyager et continuer l’œuvre du Christ. 

Quand nous sommes appelés par Jésus, nous savons qu’il y aura des endroits difficiles, que ce soit physiquement, émotionnellement ou spirituellement, et qu’ils seront autrement moins agréables qu’un jardin. Mais nous ne devons plus rechercher le jardinier, qui pourrait au mieux nous guider vers une dépouille, mais le Ressuscité, qui nous mène vers la Vie. 

Alors lorsque nous tendons à garder le statu quo, rappelons-nous que le Christ nous appelle à tellement plus !

Marie était sûrement venue pour honorer le corps du Christ par des huiles parfumées, comme il nous l’est raconté dans d’autres passages des évangiles. Elle, et les disciples, n’avaient pas encore compris la Résurrection. Aujourd’hui, nous n’avons plus l’excuse de ne pas savoir. Pourtant, il reste certaines personnes qui s’obstinent à vouloir enterrer Jésus. Comme si les enseignements qu’il a donnés lors de sa vie étaient suffisants, comme si les Écritures et la tradition étaient notre seul nécessaire, comme si le Christ avait fait sa part, et que c’était à nous de prendre le relais. Dans ma métaphore, c’est le jardinier qui représente cette manière de penser. Cet homme qui pourrait nous emmener vers le corps du Messie pour l’honorer, en prendre soin. Un corps inerte, malléable, appelé à retourner à la poussière. 

Évidemment, Marie avait sûrement les meilleures intentions quand elle espérait le jardinier ! Ça lui aurait suffi de savoir où était son corps. Elle voulait simplement s’occuper de sa dépouille, elle n’en demandait pas plus, et n’aurait certainement jamais imaginé le voir vivant ! Aujourd’hui encore, il est commun de voir des personnes se contenter de ce que le jardinier propose. De notre côté, n’avons-nous jamais espérer ce jardinier, sous une forme ou sous une autre, qui nous aurait guidé vers l’inerte, ne portant plus la vie ? On pense se satisfaire de quelques enseignements christiques, cherchant à s’occuper des petites tâches… On n’oserait tout de même pas s’attendre à plus, si ? 

Appelés par le Christ

Si, car Jésus Christ est vivant, ce premier dimanche de Pâques tout comme aujourd’hui. Que ce soit dans le jardin d’un tombeau ouvert ou dans notre société, le Messie appelle des hommes et des femmes par leur prénom et les invitent à continuer sa mission. Les petites tâches, oui ! Mais avec une grande mission, et surtout un grand Dieu derrière. Le Christ est vivant, n’essayons plus de l’enterrer ! 

Oui, Marie de Magdala espérait le jardinier, elle reçut le Ressuscité. À nous de le recevoir également. 


Jean 20.1-18, dans la traduction Nouvelle Français Courant
1Tôt le dimanche matin, alors qu’il faisait encore nuit, Marie de Magdala se rend au tombeau. Elle voit que la pierre a été retirée de l’entrée du tombeau. 2Elle court trouver Simon Pierre et l’autre disciple, celui que Jésus aimait, et elle leur dit :
« On a enlevé le Seigneur de son tombeau, et nous ne savons pas où on l’a mis. 3Pierre et l’autre disciple partirent et se rendirent au tombeau. 4Ils couraient tous les deux ; mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre et arriva le premier au tombeau. 5Il se baissa pour regarder et vit les bandes de lin qui étaient posées là, mais il n’entra pas. 6Simon Pierre, qui le suivait, arrive à son tour et entre dans le tombeau. Il voit les bandes de lin posées à terre 7ainsi que le linge qui avait recouvert la tête de Jésus ; ce linge n’était pas avec les bandes de lin, mais il était enroulé à part, à une autre place. 8À cet instant, l’autre disciple, celui qui était arrivé le premier au tombeau, entra lui aussi. Il vit et il crut. 9En effet, les disciples n’avaient pas encore compris l’Écriture selon laquelle Jésus devait ressusciter d’entre les morts. 10Puis les deux disciples s’en retournèrent chez eux.11Cependant, Marie se tenait près du tombeau, dehors, et elle pleurait. Tout en pleurant, elle se baissa pour regarder dans le tombeau ; 12elle voit deux anges vêtus de blanc assis à l’endroit où avait reposé le corps de Jésus, l’un à la place de la tête et l’autre à la place des pieds. 13Les anges lui demandèrent : « Pourquoi pleures-tu ? » Elle leur répondit : « On a enlevé mon Seigneur, et je ne sais pas où on l’a mis. » 14Ayant dit cela, elle se retourne et voit Jésus qui se tenait là, mais sans se rendre compte que c’était lui. 15Jésus lui demanda : « Pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? » Pensant que c’était le jardinier, elle lui dit : « Si c’est toi qui l’as emporté, dis-moi où tu l’as mis, et j’irai le reprendre. » 16Jésus lui dit : « Marie ! » Elle se retourne vers lui et lui dit en hébreu : « Rabbouni ! », ce qui signifie “maître !” 17Jésus reprit : « Ne me retiens pas, car je ne suis pas encore monté vers le Père. Mais va vers mes frères et dis-leur : “Je monte vers mon Père qui est aussi votre Père, vers mon Dieu qui est aussi votre Dieu.” » 18Marie de Magdala se rend donc auprès des disciples et leur annonce : « J’ai vu le Seigneur ! » Et elle leur raconte ce qu’il lui a dit.

À propos Lula Derœux

Lula Derœux est pasteure dans une église de la FEEBF en région parisienne. Elle est également en train d'étudier pour son master de théologie pratique à la FLTE. Elle est mariée avec Benjamin, lui aussi pasteur.

1 comments on “Elle espérait le jardinier, elle reçut le ressuscité 

  1. Catherine Grasswill

    Merci Beaucoup Lula pour le commentaire de ce passage qu’on ne lit que le Mardi de Pâque dans l’Eglise Catholique. Parlant beaucoup du jardin et de la personne du jardinier, vous m’avez fait découvrir le lien qu’il y a entre cette scène et Genèse 2,15 « Le Seigneur prit l’être humain (l’adam) qu’il avait formé, et il le plaça dans le paradis de délices, pour y travailler et le garder.. » (traduction de Theotex modifiée par moi-même pour « l’être humain » . Jésus est l’être humain qui prends soin du jardin de Dieu…
    Merci encore et Bonne fête de la Résurrection…
    Catherine

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