Je m’appelle Colette, j’ai 44 ans, 4 enfants et je travaille dans une association chrétienne. Quand j’étais jeune (il y a longtemps), je ne pensais pas que mon Église avait des problèmes avec le ministère féminin. Aucune femme ne prêchait, mais je pensais que cela allait évoluer avec le changement de génération. Ainsi je me suis épanouie sans difficultés dans différents domaines de la vie d’Église : j’étais responsable groupe de jeunes, je travaillais parmi les enfants et j’intervenais de manière occasionnelle avec le groupe de jeunes lors de cultes.
Après mon mariage, on me proposait d’intervenir lors d’introductions de culte avec mon mari. Au début, j’avais plaisir à le faire avec lui puis petit à petit c’est devenu pesant. Un ancien, responsable d’Église, a prit cette question au sérieux. Il a organisé des études bibliques sur la question du ministère féminin. C’était relativement positif mais sa conclusion était la suivante :
« Les femmes ont dû intervenir dans la Bible quand il n’y avait plus d’hommes. Dans notre Église nous avons encore suffisamment d’hommes, il n’y a donc pas ce besoin. »
Dur, dur !
C’était dans les années 2000, j’avais des enfants en bas âge et des responsabilités dans mon travail. Je n’avais pas le temps de m’appesantir sur la question.
Certains prédicateurs persévérants continuaient à me proposer d’intervenir occasionnellement dans le cadre du culte. En 2016, l’Église était en quête de nouveaux prédicateurs et un sondage de discernement de ministère a eu lieu auprès des membres de l’Église. Mon nom a été fréquemment cité pour la prédication. Deux anciens sont venus chez moi pour en parler :
Colette, tu as eu beaucoup de voix, mais 5 personnes anonymes dans l’Église se sont positionnées contre le ministère féminin à la prédication sous peine de ne plus venir. Tu comprends donc qu’il n’est pas possible que tu deviennes prédicatrice. Il faut certainement du temps, et les choses évoluerons. Nous n’allons pas brusquer les choses.
Dur, Dur!
J’étais en colère : impossible de parler avec des personnes qui se cachaient derrière un anonymat. C’était trop facile! Comme j’étais attachée à mon Église, je n’envisageais pas de partir.
J’ai pris mon mal en patience et j’ai décidé de me former durant cette période d’attente. L’Église a financièrement pris en charge la moitié de ma formation. Les responsables ont même dû rédiger une lettre pour me recommander auprès de l’organisme de formation. Ils ont écrit que celle-ci pourra surtout m’aider dans mon ministère auprès des enfants ! Nous sommes tous des grands enfants !
Je me suis lancée dans cette formation sur 5 ans en laissant le temps nécessaire pour que les choses puissent évoluer. Cela me pousse à réfléchir plus profondément à cette question du ministère féminin, et du ministère de manière plus globale. Cette démarche m’enrichit énormément et m’ouvre des perspectives que je n’avais pas imaginées. Dieu arrive toujours à transformer les choses de manière positive, c’est extraordinaire ! Il nous conduit sur des sentiers certes plus étroits mais tellement plus riches.
Voici quelques questions qui font désormais partie de mon expérience personnelle et qui me semblent essentielles à débattre au sein de chaque Église :
- Comment donner l’occasion à chacun d’exercer ses dons ?
- Qu’est-ce qu’un don spirituel ? Est-ce que ce sont les dons de la musique, de l’organisation, de la cuisine ? Y en a-t-il d’autres que Dieu nous demande de faire fructifier dans l’Église ?
- Nous sommes tous des prêtres (1 Pi 2.5) ; il n’y a donc pas de notion de hiérarchie dans l’Église. Jésus en est le chef. Comment le vivre ?
Ces questions tournent autour de la gouvernance de l’Église. Ce thème me semble important à approfondir car il touche à la place de chacun : homme et femme. Nous ne pouvons pas rester cachés sur nos bancs et nos chaises, c’est malheureusement parfois ce à quoi le fonctionnement nous contraint.
La suite, dans 10 ans !
Bonjour, merci pour ce témoignage, je reste toujours attentive aux textes que vous publiez et au ministère de “servirensemble”, j’ai hâte de commencer mes études en sociologie pour traiter justement de la question du ministère féminin du point de vue sociologique.
J’aimerais passer un encouragement à Colette qui nous dit :
«Dieu arrive toujours à transformer les choses de manière positive, c’est extraordinaire ! Il nous conduit sur des sentiers certes plus étroits mais tellement plus riches.»
Effectivement, comme nous le déclare le prophète Daniel c’est Dieu qui est aux commandes et qui établit qui il veut, quand il veut. Le Seigneur nous ne nous enseigne-t-il pas que nous avons tout intérêt à nous mettre à la dernière place en attendant qu’Il nous appelle devant tous à « monter plus haut » ? Et Il le fera au moment convenable, après nous avoir formé et émondé intérieurement pour que nous portions du bon fruit pour sa gloire et pour l’édification véritable de ceux qu’Il aime. Et à ce moment là, rien ni personne ne pourra s’opposer à celui, ou celle, que Dieu a établi.
Les questions qu’elle se pose fort justement concernant la gouvernance et la place des dons dans l’assemblée ont encore besoin de découvrir plusieurs facettes des réponses divines…