Un film qui ne laisse pas indifférent. Entre « comédie dramatique et thriller d’investigation »[1].
Magnificat, en salles depuis le mois de juin, est le premier long métrage de la réalisatrice Virginie Sauveur et s’inspire librement du roman Des femmes en noir d’Anne-Isabelle Lacassagne, paru en 2017 aux Éditions Rouergue.
Scénario surprenant
À la mort de Pascal, prêtre très apprécié de sa paroisse, on découvre qu’il s’agissait… d’une femme. Incrédulité, stupeur, déni. Dès le début du film, nous voilà entraînés dans la résolution de l’énigme : comment une femme a-t-elle pu devenir prêtre ? comment a-t-elle réussi à dissimuler son sexe pendant tout ce temps ? Suspense assuré tout au long du film ! Tandis que les uns essayent d’en avoir le cœur net, les autres aimeraient étouffer l’affaire au plus vite.
Dans ce choix difficile à faire, la chancelière du diocèse de Paris, incarnée par Karin Viard, s’oppose à l’évêque et son auxiliaire. Le spectateur, la spectatrice est marqué par l’impossibilité pour les responsables de faire face à une réalité qui échappe à leur contrôle. Au-delà de la tristesse que ce dialogue provoque, la scène en question est tout à fait délicieuse.
Un combat pour la vérité
Tout au long du film, nous suivons la chancelière dans les coulisses de sa vie personnelle où elle vit, non sans lien avec les pressions qu’elle subit à son travail, une libération qui lui permet de s’affranchir d’une dépendance trop étroite à l’égard de sa hiérarchie. L’intrigue secondaire, celle de l’identité du père de son fils de quinze ans, se révèle elle aussi étroitement liée à la théologie et la pratique de la prêtrise. Ainsi le film n’aborde pas uniquement l’impossibilité pour les femmes d’être prêtre, mais aussi le célibat imposé aux prêtres et les questions que cela soulève. En filigrane se déploie une autre question cruciale : que va-t-on protéger, la vérité ou l’institution[2] ? Pour quoi va-t-on se battre ? Quelle sera la priorité ? Une question à laquelle nous ne pouvons échapper quelle que soit l’institution à laquelle nous sommes attachés.
S’en remettre à Dieu
Les personnages secondaires du long-métrage sont aussi touchants, du père Lataste qui vivait en collocation avec le (la) prêtre décédé, au Docteur Grammel qui a accompagné ce dernier dans sa maladie et qui ose remettre l’auxiliaire à sa place, le renvoyant à ses propres incohérences.
Dans sa conversation avec la chancelière, le père Lataste, ancien enseignant au séminaire et premier confident de Pascal, nous offre un magnifique rappel de la nécessité de s’en remettre à Dieu dans toutes les décisions que nous prenons, de nous confier entièrement à l’appréciation et au jugement de Dieu pour vivre libre de toute crainte d’être jugé par les êtres humains. Il y a des choix de vie qui ne sont pas facile à vivre, à assumer : la priorité est au regard de Dieu et au désir de suivre les traces du Christ.
D’aucuns critiquent l’improbabilité du scenario, mais pourquoi pas. Dieu ne manque pas de créativité lorsqu’il met en résonance nos expériences de vie pour nous permettre d’avancer. Le film grand-public n’aborde évidemment pas la thématique sous l’angle théologique, mais cela n’empêche pas de se laisser rejoindre par les questions qu’il soulève.
Se laisser rejoindre
Magnificat ne s’interroge pas seulement sur l’impossibilité d’être femme et prêtre au sein de l’Église catholique, mais nous rejoint chacun et chacune dans nos propres fonctionnements : à quels obstacles les femmes font-elles face dans notre tradition, dans nos Églises ? quels sont les interdits auxquels elles se heurtent encore ? À quel avenir commun rêvons-nous et comment contribuer à la réalisation de nos rêves ?
Le long-métrage se termine sur une vision d’espoir, comme pour dire que la vie est plus forte que la volonté, aussi déterminée soit-elle, de verrouiller (littéralement !) tout changement.
Hommes et femmes, nous sommes tous et toutes porteurs et porteuses de cette vie capable de transformer nos systèmes et enfermements en liberté.
Reste une question : pourquoi le film s’appelle-t-il Magnificat ? Je n’en dis pas plus…
Références
[1] Chantal Laroche Poupard, « Magnificat », Signis, 21/06/2023, en ligne : https://www.signis.net/nouvelles/culture/21-06-2023/magnificat, consulté le 31/08/2023.
[2] Cf. « Critique du film Magnificat : de justes propos sur la vérité dans l’Église », RCF, 23/06/2023, en ligne : https://www.rcf.fr/articles/culture/critique-du-film-magnificat-de-justes-propos-sur-la-verite-dans-leglise, consulté le 31/08/2023.
Images : sanscritique.com
ça donne envie d’aller le voir du coup… merci ; )
C’est déjà l’histoire (ou la légende ) de sainte Marine ou Saint Marin au VIIIè siècle
“Sainte Marine ou Marina, entrée au monastère déguisée en garçon.
Marine née en Bithynie au VIIIe siècle. Son père, veuf, entra au monastère, fit l’admiration de ses frères par sa sainte vie et introduisit sa fille, déguisée en garçon, sous le nom de Marin.
Ce fut un moine parfait, quand une calomnie l’accusa d’avoir séduit une jeune fille. Elle ne voulut pas se justifier en dévoilant son sexe, subit avec patience une dure pénitence. La vérité ne fut connue qu’à la toilette mortuaire en 750. La coupable fut guérie par un miracle de “Marin” après sa mort.
Les reliques furent transférées de Constantinople à Venise le 17 juillet. Une paroisse de Paris l’eut jadis comme patronne.” Dans Nominis