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La misogynie dans l’Église?

Mario Leimgruber, pasteur à Neuf-Brisach (68)

Il y a une quinzaine d’années, l’Église, dans laquelle j’exerçais un ministère pastoral, a eu le souhait de clarifier la place de la femme dans l’Église. En effet, il arrivait ponctuellement qu’une missionnaire y apporte la prédication et nous voulions, par souci de cohésion avec les Écritures, revisiter les textes bibliques pour les écouter à ce propos et ainsi clarifier notre position. Aussi, lors de la lecture des textes de la Bible et en nous aidant de commentaires, nous avons rencontré une grande diversité de points de vue chacun argumentés à partir des Écritures.

Dans le cadre de ce travail, une question fondamentale nous est apparue. Elle devait, selon nous, précéder la lecture et l’analyse des textes bibliques : « Quel est notre rapport aux femmes ? » Ou, de manière plus abrupte, « avons-nous un postulat misogyne ? »

Par misogynie, il ne faut pas seulement comprendre littéralement « la haine de la femme », mais aussi toute forme de domination masculine sur le féminin, de manière si discrète, voire douce, qu’elle est quasiment imperceptible. Ainsi, formulé lapidairement, la misogynie tend à vouloir hiérarchiser les sexes, où le féminin est inférieur au masculin.

Cette question nous a paru fondamentale puisque la femme, dans l’histoire judéo-chrétienne, tient plutôt une place d’être inférieur.

De fait, et en lien avec l’histoire, il nous est apparu que la probabilité d’une subtile misogynie, inscrite comme habitus en raison d’une longue mémoire dans ce sens, devait être reconnue et admise pour la placer comme postulat de compréhension des textes bibliques.

Ce postulat nous est apparu d’autant plus important si nous tenons compte du récit de la Genèse 3:16-19 qui présente la domination de l’homme sur la femme comme une malédiction. Ainsi, la question de la place de la femme dans l’Église renvoi aussi, selon nous, à re-considérer ce récit de la Genèse et des conséquences sur les relations hommes-femmes.

En parlant de postulat plus haut, nous voulions inviter à ne pas lire les Écritures à partir d’une posture de malédiction-misogynie justifiée bibliquement. Il nous fallait aussi nous interroger en amont, si notre Église présente une misogynie ou non, et de reconnaître qu’il n’est pas simple d’y répondre, tant celle-ci peut apparaître comme normative, voir « biblique ».

Pour aller un peu plus loin encore, nous pouvons y découvrir un enjeu théologique et existentiel de taille et cela, au moins, sur deux points.

En comprenant cet enjeu nous avons saisi, qu’au-delà de savoir si une femme pouvait prêcher ou non, il nous fallait surtout travailler à changer notre mentalité (habitus) qui trouve aussi son terreau dans un monde misogyne et offrir au monde des relations hommes-femmes restaurées et mutuellement bénissantes.  Toutefois, nous tiendrons compte que cet article a été écrit par …. un homme… !

Bibliographie :

[1] Beate Krais, « Autour du livre de Pierre Bourdieu La domination masculine  », Travail, genre et sociétés 1999/1 (N° 1), p. 214-22

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