Spiritualité

« Dans la troupe du royaume de Dieu » – comment trouver sa place dans l’Église ?

Besoin d’encouragement ? On ne te prend pas au sérieux parce que tu es une (jeune) femme et que « ta seule destinée c’est le mariage » ? Nous sommes heureuses de partager avec toi aujourd’hui cet article de Mary Cotes paru d’abord dans « Ce que j’aimerais te confier – tisser des liens essentiels entre les générations« , livre de l’association Femmes 2000 publié cette année chez Farel. Nous ne doutons pas que tu seras fortement encouragée par ses paroles que nous trouvons pleines de sagesse.

Chère petite sœur en Christ,

Je suis très émue par la question que tu m’as posée : « Comment une jeune femme comme moi trouve-t-elle sa place dans l’Église ? »

Lorsque tu es venue me parler à la sortie du culte, je t’ai sentie abattue et découragée. Pourtant, tu arrives à un moment important de ta vie. Belle et très intelligente, tu viens de finir brillamment tes études de théâtre. Toute petite tu te passionnais déjà pour les arts, et maintenant tu souhaites faire ta carrière en tant que comédienne. Une troupe de théâtre connue t’a déjà offert un rôle principal dans une de leurs tournées.

Tes parents sont aux anges pour toi ! Ravie, tu t’attendais certainement à recevoir des félicitations de la part des autres membres de la famille. Pourtant, lorsque tu as annoncé la nouvelle à ton grand-père, il t’a écoutée, silencieux, sans dire un mot. Bon évangélique, ancien d’Église, il te répond : « Mais ma princesse, tu as fini tes études, alors c’est bien le moment pour penser à te marier. C’est ainsi que tu connaîtras le véritable épanouissement que Dieu réserve pour toi. J’attends d’avoir des arrière-petits-enfants. »

Une semaine plus tard, tu as assisté à la fête d’anniversaire de ce grand-père. Toute la famille était là, y compris tes cousins, pasteurs tous les trois. A la fin de la soirée, ton grand-père a voulu prier pour ses petits-enfants. Il a amené tes cousins devant Dieu, remerciant le Seigneur de les avoir appelés à son service, mais il n’a même pas prié pour toi. 

Tu avais l’impression de n’exister ni pour lui, ni pour Dieu. Des larmes aux yeux, tu m’as dit : « Et si je lui avais annoncé que j’allais devenir pasteur, comme mes cousins ? Il n’aurait toujours pas été d’accord. Il n’aurait toujours pas prié pour moi. Je suis prise au piège. »

Ce matin encore, certaines personnes de l’Église ont saisi l’occasion de te faire les mêmes réflexions que tu as reçues de ton grand-père. Je comprends alors pourquoi tu me demandes comment une jeune fille comme toi peut trouver sa place dans l’Église. Je ne prétends pas avoir toutes les solutions, surtout en ce qui concerne ta relation avec ton grand-père que je ne connais pas. La question que tu poses a une grande portée, certes, et je ne peux pas tout dire en une seule lettre. Pourtant, je me permets de t’offrir quelques mots d’encouragement à partir de mon expérience.

Réjouis-toi d’abord.

Une femme n’a jamais besoin de « trouver » sa place dans l’Église : Dieu la lui a déjà préparée. A partir du moment où nous recevons la nouvelle vie en Christ, notre relation avec Dieu est assurée. Par le baptême Dieu offre à la femme comme à l’homme une place précieuse dans la nouvelle communauté fondée en Christ. Nous n’avons rien fait pour la mériter ; Dieu a tout accompli en Christ. La place qui nous attend dans l’Église ne dépend donc pas de nous. Elle nous est offerte gratuitement, et notre rôle est celui de la recevoir par la foi. Elle vient de la main de Dieu.

Lis toi-même les évangiles.

Tu verras que seules les qualités du Royaume de Dieu comptent pour Jésus.

Une femme chrétienne est avant tout une disciple de Jésus et une apprentie du Royaume, qu’elle soit mariée ou célibataire, veuve ou divorcée. 

Selon les évangiles, Jésus ne dit jamais à une femme que le but principal de sa vie devant Dieu est celui de se marier. Jésus invite les femmes et les hommes à marcher dans ses pas. Les femmes qui suivent Jésus viennent de tous les contextes : il y a des femmes mariées ; des célibataires ; des veuves. Il y a des femmes qui viennent d’un milieu aisé ainsi que des prostituées. En suivant Jésus et en le servant (Mc 15 : 40-41) elles témoignent des éléments essentiels du discipulat. Lorsque Jésus guérit une femme d’un écoulement de sang (Mc 5 : 25-34), il ne lui dit pas qu’elle est maintenant en mesure d’avoir des enfants. Au contraire, il lui parle de sa foi. En lisant les évangiles, tu verras bien que le point de vue de ton grand-père n’a rien à faire avec l’enseignement de Jésus.

Résiste…

…donc à la pression « spirituelle » d’être conforme à une image particulière de la femme chrétienne. Tu es appelée à suivre le Christ et à être conforme à son image, à lui seul. L’unité de l’Église ne dépend pas de notre capacité à faire les mêmes choix de vie que les autres ont faits. Elle est fondée sur le sacrifice de Jésus qui nous appelle à aimer nos frères et sœurs, quelles que soient nos différences culturelles ou sociales. 

« Il n’y a plus ni Juif ni Grec ; il n’y a plus ni esclave, ni homme libre ; il n’y a plus l’homme et la femme ; car tous, vous n’êtes qu’un en Jésus Christ (Galates 3.28) » 

Que ton profil ne corresponde pas à celui des autres jeunes chrétiens et chrétiennes, peu importe. L’Église est appelée à t’accueillir et t’aimer telle que tu es. Comme toi, tu es appelée à accueillir et aimer les autres. Ta relation avec Dieu sera plus profonde si tu restes fidèle à toi-même. 

Il m’a fallu bien des années pour être libérée du poids de cette pression « spirituelle ». Je me souviens du moment où un ancien de l’Église a voulu me donner un conseil. C’était un homme adorable et plein de bonté. J’avais une vingtaine d’années à l’époque et je venais de faire une maîtrise. Je me lançais dans l’enseignement. J’avais beaucoup d’affection pour ce frère et je voulais prendre au sérieux ce qu’il avait à me dire. Pourtant, je n’ai pas su comment réagir lorsqu’il m’a dit : « Si tu veux te trouver un bon mari chrétien, tu dois dissimuler ton intelligence. » Cette petite phrase m’a beaucoup blessée. C’était comme si Dieu me demandait de jeter à la poubelle une grande partie de moi-même. Au cours des années qui ont suivi, j’essayais par moments de faire semblant d’être quelqu’un que je n’étais pas. Ma relation avec Dieu en a souffert. Grâce à l’intervention d’une chrétienne, enseignante remarquable, j’ai fini par comprendre que si Dieu m’avait donné de l’intelligence, il voulait certainement que je la lui offre en retour et la mette à son service. Je te transmets à mon tour ce qu’elle m’a transmis : si Dieu t’a dotée d’un don pour faire du théâtre, consacre-lui ce don merveilleux.

Garde précieusement ta relation avec l’Église de Christ.

Dieu qui t’y a préparé une place t’appelle à en vivre la réalité. Les anciens ont raison de te rappeler l’importance d’une vie d’Église. Si tu pars en tournée, cherche toujours à rester en communion avec tes sœurs et frères en Christ d’ici : par la prière, par les réseaux sociaux ou par des messages. Entretemps, n’oublie jamais que tu fais partie de l’Église universelle. Pendant de longues années, j’ai exercé un ministère dans le milieu œcuménique. J’ai participé aux chants des pentecôtistes et au silence profond des quakers. J’ai découvert la passion de l’Armée du Salut pour l’action sociale et l’engagement des mennonites pour la paix. Dieu est grand et beau ! Plus je me suis laissé toucher par les grandes richesses des autres dénominations, plus ma place au sein de l’Église de Christ m’a paru belle et merveilleuse.  

Grandis dans ta vie professionnelle à la lumière de Christ.

Ta place dans l’Église est assurée, et maintenant Dieu t’en a préparé une autre en dehors d’elle. L’Église n’est pas un cocon. Dieu qui est à l’œuvre dans toute sa création a besoin d’hommes et de femmes qui, tous et toutes, témoignent de leur foi dans la société actuelle. Cherche constamment à faire le lien entre ta foi et ton métier. Si tu te dirigeais vers la médecine, je te dirais de te laisser inspirer par le Guérisseur parfait. Si tu avais choisi l’enseignement, je te conseillerais de te mettre aux pieds du Pédagogue divin. Mais toi, comédienne, n’oublies jamais que Jésus racontait des histoires pour transformer la vie à ses auditeurs. C’était le grand Artiste. Ses paraboles menaient les foules à se remettre en question et leur ouvraient les yeux sur les valeurs éternelles du Royaume de Dieu. Choisis donc tes rôles avec soin. Par le spectacle, tu as la possibilité d’attirer tes publics vers le bien, et vers « tout ce qu’il y a de vrai, tout ce qui est noble, juste, pur, digne d’être aimé, d’être honoré » (Ph 4 : 8). Dieu te confie ce ministère précieux. 

Affirme ta place dans l’Eglise…

en partageant avec les frères et sœurs tout ce que Dieu t’aura appris, y compris dans le milieu professionnel. Une assemblée est bien enrichie par la vie spirituelle qui jaillit des expériences professionnelles de ses membres. Cherche humblement en toi l’humanité de la personne dont tu joues le rôle. Lorsque tu dois incarner sur scène les souffrances atroces d’un personnage ou les péchés monstrueux d’un autre, laisse-toi entraîner un peu plus dans le mystère de Celui qui, à la croix, a supporté toutes nos douleurs et porté les fautes des foules. Fais la connaissance intime de ce Christ. Tu auras un témoignage important à apporter au sein de l’Église.

Tu ne seras jamais au chômage dans le théâtre du Royaume de Dieu ! Tu as un rôle essentiel à y jouer en tant que disciple. Ma sœur en Christ, mets-toi tous les jours aux pieds du Metteur en scène divin et laisse-toi diriger par lui. Ce rôle de disciple sera, sans hésiter, le plus grand et le plus important de ta vie.

À propos revdmcotes

Mary Cotes est pasteure baptiste anglaise. Ayant fait ses études doctorales de théologie, elle a exercé un ministère dans de nombreux contextes, y compris l’aumônerie d’un hôpital psychiatrique. Autrice de Women Without Walls et Quand les femmes se mettent à l’œuvre, elle exerce un ministere itinérant. . Musicienne diplômée, elle donne également des cours de piano.

8 comments on “« Dans la troupe du royaume de Dieu » – comment trouver sa place dans l’Église ?

  1. Claire Poujol

    Bonjour à chacun et chacune. Lorsque j’ai lu ce qu’un ancien avait dit à cette jeune chrétienne :  » Si tu veux te trouver un bon mari chrétien, tu dois dissimuler ton intelligence « , j’ai poussé un CRI !
    Surtout qu’il l’a dit avec une grande gentillesse, et qu’il connaissait bien la mentalité horrible de son assemblée. Il voulait assurément l’aider.
    Je me dis  » ne vaut-il pas mieux alors quitter un milieu aussi toxique ? »
    Quand j’avais 18 ans, jeune convertie, j’ai eu un peu le même genre de remarque dans mon église (l’Armée du Salut à cette époque) : « pourquoi commences-tu des études de psychologie ? Jésus va bientôt revenir, alors à quoi bon ? »
    Dieu merci, venant d’une famille d’universitaires, chaque enfant était poussé à la Fac aussi loin que possible et je n’ai pas écouté ces bêtises. Mais une autre jeune fille aurait peut-etre pu être découragée et alors quel gâchis !
    donc j’ai fait mes etudes, et seulement ensuite j’ai obéi à l’appel de Dieu qui m’a conduite à le servir dans ce mouvement avec mon mari pendant un long temps de notre vie. Par la suite nous avons écrit ensemble des ouvrages surtout axés sur les liens entre psychologie et foi.
    J’encourage chaque jeune femme à servir le Seigneur avec ses dons, dans ou hors de l’Eglise.

    • Sikè doualla

      Merci pour les encouragements

    • Caroline

      Moi aussi très choquée par cette réponse d’un ancien. Mais de là à « fuir »… que les femmes s’édifient toujours d’avantage pour précisément répondre à de telles affirmations, qu’elles osent demander par exemple : « c’est où dans la Bible ? », qu’elles puissent citer la Bible, prendre le temps de vérifier et y revenir.
      Nous devons changer certaines mentalités et fausses conceptions, oui, mais de l’intérieur de nos Eglises, la famille spirituelle dans laquelle Dieu nous a placées.

      D’ailleurs, contrairement à ce qu’écrit Mary, je ne lis aucun « enseignement » de Jésus sur le célibat (ou pas) des femmes. Par contre, l’apôtre Paul a clairement écrit que le célibat était une excellente chose en 1Corinthiens 7, avec cet extrait magnifique : « chacun tient de Dieu un don particulier, l’un d’une manière, l’autre d’une autre ».

      • revdmcotes

        Bonjour Caroline,
        Merci pour votre commentaire intéressant.
        Loin de proposer que Jésus ait enseigné le célibat (même si lui, n’était pas marié), j’affirme dans mon article que ce qui comptait pour Jésus, c’étaient les valeurs du Royaume de Dieu. Jésus n’a poussé ses auditeurs ni vers le célibat, ni vers le mariage. Leur situation de famille n’était tout simplement pas sa priorité. Il appelait les femmes comme les hommes à le suivre : c’était surtout leur discipulat qui l’intéressait.
        (Voir : https://servirensemble.com/2019/10/25/lhomme-et-la-femme-du-pareil-au-meme-reponse-a-point-theo/)
        Jésus ne cherchait au cœur des femmes qu’il rencontrait, ni les qualités d’une mère/épouse, ni l’engagement au célibat. Il cherchait les qualités comme la foi (la femme à l’écoulement de sang) ou la compréhension profonde de son oeuvre (la Cananéenne et la femme au parfum). Alors, on ne voit les femmes des Évangiles, suite à leurs rencontres avec Jésus, ni souhaiter le mariage, ni vouloir rester au sein de la maison de leur père. (A l’époque, la plupart des jeunes femmes ne pouvaient pas prendre pas la décision de se marier ou pas : une jeune femme vivait sous l’autorité de son père, et elle était donnée en mariage par lui.) On les voit devenir les disciples passionnées de Jésus (Luc 8.1-3) ou des évangélistes (Matthieu 28.10 ; Jean 4.28-29). Elles offrent des modèles de fidélité (Marc 15.40-41) ou de générosité (Marc 12.41-44) pour tout le monde.
        Mon article ne fait pas directement mention du célibat. Dans nos milieux évangéliques on a surtout tendance à présupposer que la famille (non pas le célibat) est la priorité de la femme chrétienne « normale. » Au lieu d’entendre parler de la femme en tant que disciple avant tout, on entend parler de la mère/épouse. Dans mon article, je m’adresse à cette situation, tout en offrant un encouragement personnel à une jeune femme de ma connaissance. Il faut comprendre ce que j’ai écrit dans ce sens.
        Vous avez cité Paul, et peut-être SE devrait-il un jour discuter de ce que Paul a enseigné sur le célibat. Il serait intéressant d’approfondir le sens du célibat vécu dans le contexte social de l’époque. Merci beaucoup de nous avoir donné cette idée !

  2. Soisbelleetsoumetstoi

    L’histoire de ma vie 😎 Je ne compte pas les « non mais tu es trop cultivée pour trouver qqn » ou encore « tu ne vas jamais trouver un mari qui arrive à ton hauteur. Tu es trop brillante intellectuellement ». Mais LOOOOOL. Heureusement que Dieu nous aime comme on est et se sert de nos personnalités pour l’avancement de son Royaume.

  3. Sikè doualla

    J’ai compris une chose de ne jamais faire les choses pour plaire aux Hommes mais à Dieu. Que le don de chacune et chacun aide pour soutenir les âmes faibles, désespérés, angoissé,….

  4. Ca fait plaisir de lire cela ici! De la part d’une réformée de 40 ans qui est devenue pasteur après avoir compris dans sa chair que souvent la communauté est pleine de défaut mais qu’elle met le doigt là où ça fait mal à toi et à elle. Ma communauté m’a demandé d’enseigner au plus jeunes à un moment où je ne trouvais pas ma place dans l’église. J’ai fait ça pour rendre service et j’ai rencontré en la personne d’un autre catéchète le goût de l’étude de la Bible alors que je ne l’ouvrais plus depuis quelques années. Plusieurs rencontres plus tard je me suis orientée vers les études de théologie…Cette communauté qui avait du mal à faire de la place aux plus jeunes et aux femmes en particulier m’a pourtant donné l’occasion de trouver mon chemin pour suivre le Christ;) Alors si dans une communauté ou une famille on a ce genre de remarque sur la place d’une partie de la population, on peut le voir comme un signe d’encouragement à justement réfléchir à cette question pour proposer des réponses différentes qui ne soient pas celle de la tradition, de la société mais celle que le Seigneur nous donne.

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