Spiritualité

« D’une prison » – Linda Oyer

Que peut ressentir une femme, dévouée à la cause de Christ, nouvellement diplômée, de toute évidence jugée « capable d’enseigner » (2 Tim 2 : 2) car ayant décroché son premier poste en institut biblique, quand subitement, son entrée en fonction est ANNULÉE par un nouveau directeur… avec pour seul motif qu’elle est femme. Un choc ? Une grosse déception devant ce frein mis à son « ambition » ?  De l’amertume ?

Ou quelque chose de plus profond encore…

Chut ! car une âme livre sa peine…

D’une Prison (inspiré par le psaume 73)

Malheur à la femme à qui Dieu
accorde des dons « réservés aux hommes ».

Malheur à elle, car on lui refusera
l’exercice de ses dons.

Elle sera enfermée dans une prison
         de malentendus
         de mépris
         de crainte.

Détruite par les besoins d’autrui
Elle protesta : Injustice !
Je ne suis pas faite pour une prison
bâtie de mains d’hommes.
J’ai du travail à faire.
Le désir d’utiliser ses dons est-il un crime
méritant la prison ?

Les murs de sa cellule criaient en réponse :
          orgueilleuse
          prétentieuse
          usurpatrice
          dominatrice.

Elle apprit vite
qu’on ne dénonce pas
l’injustice du fond d’une prison.
Et cela devint son enfer.

Son cœur s’aigrit.
Son esprit s’affligea…
Jusqu’à ce qu’elle entre dans le Sanctuaire de Dieu.

Elle repensait à Paul…
Son ministère, sa richesse,
Ses mots écrits de sa cellule,

« Moi, Paul, prisonnier du Seigneur Jésus Christ ».

Elle repensait au Fils unique de son propre Gardien…
N’avait-il pas, lui aussi, passé 30 ans en prison ?
Ne fût-il pas déchiré par les besoins…
les aveugles, les lépreux, les vies vides
qu’il aurait si facilement transformés.
Son Gardien à elle connaissait sa prison.
Et pourtant, lui accorda les dons
qui l’ont faite enfermer.

Son Gardien n’a-t-il pas le droit
de la priver de ses dons ?
de la sceller ?

Comme par la pénétration d’un rayon de lumière
au scellement de sa clôture,

Elle sut qu’enfermée dans la prison de Néron

Elle n’était pas la prisonnière de Néron.

Ainsi, elle grava sur les murs de sa cellule
(pour ne jamais oublier)

«Moi, prisonnière du Seigneur Jésus Christ »

Et, elle s’entendit redire doucement
des paroles apprises
dans d’autres prisons :

« Dieu, qui ai-je au ciel que toi.
Et t’ayant toi,
je ne désire rien d’autre sur terre ».

© Linda Oyer, 1982
Linda Oyer est professeur de Nouveau Testament au Centre Mennonite d’Études et de Rencontre et chargée de cours à la Faculté Libre de Théologie Évangélique de Vaux-sur-Seine. Elle a participé à de nombreux ouvrages. Nous la remercions de partager ce poème émouvant, écrit quelque temps après l’évènement décrit dans notre introduction.

Victoria Declaudure a été membre de l'équipe pastorale de l'Eglise Vie Nouvelle (Saumur) pendant 17 ans avant de rejoindre celle de l'Eglise Evangélique d'Angers. Titulaire d'un master en théologie, elle est l'auteur de plusieurs articles ainsi que du mook 'Pionnières du XXième siècle, le ministère oublié des femmes pentecôtistes françaises 1932-48'

7 comments on “« D’une prison » – Linda Oyer

  1. Claire Poujol

    Que de souffrances ! Je connais très peu Linda, seulement « de réputation ». Ce récit si émouvant, bouleversant même, m’a fait penser à Joseph en prison, qui un jour devient gouverneur d’Égypte. Dieu ne l’avait pas oublié.
    Merci Linda de nous avoir partagé ce texte si intime.

    • Victoria Declaudure

      Oui, « intime » est le mot qui vient à l’esprit. Un texte riche de signification.
      J’ai suivi un excellent cours de Linda à l’école d’été de Vaux-sur-Seine : je n’avais jamais imaginé qu’elle aussi avait expérimenté ce type de situation.

    • Il y a effectivement des similitudes avec l’histoire de Joseph en Égypte ; Entre l’appel de Dieu et sa réalisation concrète, il y a souvent un (plus ou moins long) temps de nettoyage intérieur qui va mettre à nu et «désinfecter» toutes les rancoeurs et les amertumes consécutives aux réactions charnelles venant des blessures reçues. Même un bon bistouri doit nécessairement passer à l’autoclave pour être débarrassé de tout germe qui pourrait infecter les plaies dans lesquelles il est sensé travailler. Combien plus un instrument choisi par Dieu !

      En réalité, c’est Dieu qui qualifie et qui désigne à tous la place qu’Il a choisi pour nous. Lorsque viendra le moment où Il dira : «monte plus haut !», aucun «gardien du Temple» ne pourra s’y opposer.

  2. Gladys Geiser

    Merci pour ce magnifique poème qui correspond si bien à Linda! Ayant suivi plusieurs de ses enseignements j’ai ce grand privilège de la connaître. On reconnaît dans ce texte sa grande sensibilité à l’injustice qui engendre la souffrance mais aussi cette force d’oser la confrontation dans la vérité, sans rancune parce que se sachant profondément aimée par le Christ !

    • Marie-Noëlle Yoder

      Merci pour ces mots Gladys, c’est exactement ça!

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